Rencontre
avec Antonio Fiorencio est directeur du
département d'économie de l'IBMEC

UMAP
: Pourquoi êtes-vous francophone ?
A.F. : Comme
beaucoup de professeurs brésiliens, j'ai
suivi des études en France. En l'occurrence,
un doctorat et un DEA au " Delta ", boulevard
Jourdain (NDLR : Département d'économie
créé conjointement par l'ENS-Ulm, le CNRS
et l'EHESS). J'avais très tôt pris la décision
de partir en France : dès l'âge de dix-sept
ans, j'ai suivi les cours de l'Alliance
Française.
UMAP
: Quand êtes-vous retourné au Brésil ?
A.F. : En 1993.
J'étais au début professeur à temps partiel
à l'Université Fédérale de Fluvinere et
à l'IBMEC. Je travaille à temps plein à
l'IBMEC depuis 1995 et je dirige le département
d'économie en 1999.
UMAP
: Quelle est l'histoire de l'IBMEC ?
A.F. : L'IBMEC
ne ressemble à aucun autre établissement
d'enseignement supérieur. Il a été créé
en 1970 en tant qu'institut de recherche
spécialisé dans l'étude des marchés de capitaux
: il ne prévoyait au départ aucune activité
d'enseignement. Mais en 1980, la crise économique
contraint l'IBMEC à trouver ses propres
fonds ; il lance alors des cours de mathématiques
financières et d'économétrie ; pour l'institut,
l'enseignement était une question de survie
! Au fur et à mesure, les cours sont devenus
de plus en plus qualifiés. Répondant à une
forte demande, nous avons ensuite lancé
le programme MBA. Puis, en 1996, nous avons
créé la faculté d'économie et d'administration,
spécialisée dans l'administration des systèmes
d'information. Nous avons en fait suivi
le chemin inverse des établissements classiques
: nous sommes partis de la post-graduation
pour arriver au premier cycle.
UMAP
: Comment cette originalité se traduit-elle
dans les cours ?
A.F. : Nos activités
d'enseignement sont orientées vers la pratique
et le professionnalisme. Notre credo est
de proposer des cours utiles et de haut
niveau. Nos étudiants ont quatre ans pour
étudier les systèmes les plus sophistiqués
et utiliser les techniques les plus avancées.
Nous voulons qu'ils soient prêts à tout.
UMAP
: Comment vous situez-vous sur le marché
de l'enseignement supérieur brésilien ?
A.F. : Nos premiers
concurrents sont les universités publiques.
Au Brésil, elles subissent une contrainte
financière très importante que notre petite
structure nous épargne. Mais la demande
sociale des collèges et des lycées est encore
plus importante. Conséquence, le secteur
privé, incité par le gouvernement, s'est
emparé de cette offre et représente aujourd'hui
50 % des places dans l'enseignement supérieur.
Contrairement à ce que le secteur public
prétend, il y a, du fait de la forte concurrence,
de plus en plus d'établissements privés
de très bonne qualité, comme la PUC (Université
Catholique) et le MBA Getulio Vargas. L'un
des principaux arguments contre le privé
est que le niveau du " Vestibular " est
très faible : il est vrai que les établissements
privés acceptent logiquement la candidature
des mauvais candidats qui ont les moyens
de payer. Mais la sélection se fait tout
de même, non pas à l'entrée mais à l'intérieur.
Il est " facile " de rentrer à l'IBMEC mais
beaucoup plus dur d'en sortir avec le diplôme.
C'est bien simple, nous ne diplômons que
30% de nos étudiants…
UMAP
: Peut-on comparer les systèmes universitaires
français et brésiliens ?
A.F. : En effet,
puisque le Brésil s'est souvent inspiré
de la France. Comme chez vous, nous privilégions
le caractère académique de l'enseignement,
souvent au dépend de la qualification professionnelle.
Cependant, nous n'avons pas du tout les
mêmes diplômes : le système français propose
un diplôme presque pour chaque année : le
DEUG, la licence, la maîtrise, le DEA…,
ce qui permet aux étudiants d'arrêter leurs
études supérieures avec un diplôme à n'importe
quel moment. Au Brésil, le seul diplôme
est à Bac + 4 : soit on réussit, soit on
n'a rien, ce qui explique en partie le fort
taux d'échec (NDLR : 39 %). Mais l'avantage,
c'est que, sur une séquence longue de quatre
ans, il est beaucoup plus facile d'organiser
les études.
UMAP
: Quel est selon vous le principal enjeu
du système universitaire brésilien ?
A.F. : Il y
a actuellement 55 millions d'élèves sur
l'ensemble du système éducatif. Pour l'instant,
seul un très petit pourcentage arrive jusqu'au
premier cycle, mais la hausse de la population
scolarisée est très importante. Pour parvenir
à faire accéder le plus grand nombre d'élèves
à l'enseignement supérieur, il est essentiel
et même vital de former des enseignants
qualifiés dans le secondaire…
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